Chasse patate au pays de la crevette


Le week-end dernier c’était le temps de retoxer le cycliste en moi. L’appel de la route s’est fait entendre et comme Brigitte était volontaire dans l’effort, on a rempli la bagnole de stock et on est sorti de Montréal. Direction Sainte-Anne-des-Monts pour la cyclo de la traversée du Parc. Au programme : les 140 kilomètres qui séparent New Richmond de Sainte-Anne. En temps normal, en cette presque mi-juillet l’aventure ne devrait être qu’une belle sortie de plus, une occasion de rouler en toute quiétude sur une route magnifique rythmée par des défis réguliers. Mais cette année, compte-tenu de tous mes malaises de vieux, la route promettait d’être un calvaire digne de celui vécu par les premiers colons qui ont ouvert la région jadis. Bien entendu, ma décision de retoucher encore une fois l’ajustement de mes cales le soir en arrivant à Sainte-Anne-des-Monts n’était pas celle d’un visionnaire, mais bon, comme je n’étais toujours pas bien dans mes godasses, je me suis dit que je n’avais rien à perdre à le faire.
  

Le Sea-Shack (auberge festive), une nuit chez les barbares 

Comme prévu les copains-copines étaient sur place : Simon, Gabrielle, François, Mathieu ainsi que les sœurs cosmiques, Chantale et Mélanie. La troupe a fait bonne route, le moral est au zénith. Les rires fusent, le repas communautaire préparé par Chantale et Mélanie est très bon. Notre chalet se trouve au Sea-Shack, un genre de centre d’accueil pour adeptes de kayak de mer. Le lieu nous plait bien. La place est au bas d’une petite falaise, tout a l’air cool, voir baba-cool. Mais dès l’arrivée j’avais noté quelques signes qui détonnaient de ce que je connais de l’atmosphère vaporeuse et lévitationnelle de la culture du potteux tranquille. Une affiche avait particulièrement attiré mon attention en sortant de l’auto : « Hey les kurdes, passez pas icit ». Bah, les seigneurs de la place venaient de replanter du gazon dans ce coin là et ils étaient sérieux avec ça. J’ai grandi à Laval, je sais que le gazon c’est sérieux, alors je ne m’en suis pas fait outre mesure. Et pourtant…

Un fois installé, j’ai pris quelques minutes pour donner à mon brave vélo des allures de fier destrier prêt au combat. Avec les jambes bien rasées de la veille et un vélo propre, j’allais avoir droit à un peu de respect et un peu plus d’espace pour bouger dans le peloton. En vieux loup de mer je sais bien que ce n’est pas tout d’être en forme, il faut aussi que les autres puissent le comprendre!

Après le repas, comme un peu tout le monde avait eu une longue journée, il y a vite eu consensus en faveur d’une extinction hâtive des feux, si bien que dès 21 heures certains dormaient déjà. En arrière plan, dehors, un band commençait à amuser les autres habitants du quartier, mais tout était assez inoffensif et j’ai moi aussi dormi rapidement. Ahhh, à moi le sommeil du juste! Et pourtant…


Vers minuit je me suis réveillé d’un trait : « WTF? Y’a une guerre? »

Là ça brassait, ça hurlait, ça… virait solide. Après un instant mon cerveau au 7 huitième endormi m’a quand même permis de comprendre ce qui se passait et où j’étais : j’étais chez les barbares –les saxons ou les pictes, les plus méchants- et ils devaient être en pleine célébration. J’ai craint un instant qu’ils nous prennent pour faire des sacrifices humains. À en juger au bruit, ils devaient arroser une victoire contre une légion romaine envoyée dans la région pour les mater. 

Je crois qu’entre minuit et 4 heures du mat, je n’ai rien manqué de ce pot-pourri musical satiné de cris et de hurlements qui se faisaient de plus en plus empattés à mesure que les bières et produits chimiques non répertoriés ramollissaient leurs facultés. Pour se détendre ces combattants sans peur avaient fait des choix musicaux dignes des meilleurs moments du Loft il y a une douzaine d’année, des Foufs il y a presqu’une vingtaine d’années ou même du Café Campus -le vrai, pas celui sur Prince-Arthur, il y a quoi, prés de 25 ans. Mon Hit-Parade entre minuit et 4 heures du mat comprend notamment : Iggy Pop (celle dans Train Spotting), les Ramones (sais plus lesquelles), Velvet Underground (sais plus laquelle non plus), Led Zep (Rock’n roll), Pantera (Walk), Nirvana (Smells like teen spirit et plus tard Rape Me), Rage Against the Machine (Fuck you I won’t do what you’re tellin’ me), Dead Kennedys (Too drunk to fuck, pas la version mignonne de Nouvelle Vague), Georges Thorougood (One bourbon, One Scotch, One Beer) ainsi qu’un classique des Bérus (Salut à toi). Il ne manquait qu’une petite dose de Ministry et –pourquoi pas- une incursion dans le monde de Slipknot.

Mais bon, comme je suis un type positif, je retiens de cet épisode qu’en Gaspésie, le 10 juillet, le soleil était pressé de se lever puisque dès 3 heures ses rayons perçaient la noirceur de cette nuit barbare.


La suite demain...

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