Quand t’as 7 ans, c’est grave, mais je n’ai aucun effet secondaire
Ça fait longtemps, 34 ans. Je suis là, c’est moi le roi de la journée, c’est ma fête, j’ai 7 ans. J'ai des privilèges, en plus je commence à être grand. Entre autres, j’ai la chance d’être né en été pendant les vacances d’école, alors j’ai toujours deux gâteaux de fête : un en après-midi pour la fête avec mes amis, l’autre en soirée, pour la fête avec mes mononcles et mes matantes. J’ai aussi le droit de boire du crème soda et de la bière d’épinette. Gracieuseté maman, merci maman.
À chaque année, le jour de ma fête, rendu vers 8h le soir, j’étais pas mal mûr pour une pilule de ritalin parce que mon sang était composé à environ 40% de sucre à glacer et de crème soda . Mais vers 8h le soir, fallait encore tenir le coup parce que ma grand-mère arrivait toujours à cette heure-là, son heure, avec un monstrueux gâteau forêt noire. C’était son gâteau préféré et moi j’étais son petit fils préféré –ben le seul à vrai dire- alors elle mettait le paquet. Chaque année, elle se surpassait. Je n’avais jamais vu des gâteaux si gros de ma vie. Je ne crois pas en avoir revus depuis. J’aurais dû être fou de joie, mais je n’aimais pas les cerises et, bon, il faut bien le dire, après les deux autres gâteaux, fallait que je l’aime ma grand-mère pour donner l’impression de vouloir de son monstre. C’était comme ça tous les ans, le 16 août 1977, c’était comme ça aussi.
Par contre, le 16 août 1977, c’était pas pareil. Ma tante Lorraine était absente, elle allait pas bien, pas bien du tout. Il y avait de la mortalité de son côté de la famille, son cœur était brisé, Elvis venait de mourir. Le King n’était plus. C’était grave.
Pour moi, ce qui était grave, c’est que ma matante Lorraine n’était pas là, quand t’as tout nouvellement 7 ans, c’est grave. Mais du haut de ma grande maturité, je n’avais pas pensé qu’en disparaissant le 16 août, le jour saint de ma naissance, le King allait être LE sujet de conversation le jour de ma fête pour un joyeux bout de temps. Ça, c’est ben plus grave. Ça forge une identité! Là, à tout nouvellement 41 ans, je note que ça fait 34 ans qu’on me parle de la mort d’Elvis quand c’est ma fête. Mais je suis fait fort, je n’ai aucun effet secondaire. Je pense quand même que je vais me payer un petite pointe de gâteau forêt noire.
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